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Centrafrique : biographie de Catherine Samba-Panza
Par Gaston Madenga
1. Jeunesse, études, carrière et entrée dans la vie politique.
A. Jeunesse, scolarité et études supérieures.
Née Catherine Sounga le 26 juin 1956 à Fort-Lamy - Ndjamena- au Tchad , elle est la deuxième d’une fratrie de six enfants. Son père Barthélémy Djou est un aide-comptable originaire du Cameroun et sa mère Henriette Waloma - ou Warouma - est centrafricaine - Banziri -. Catherine grandit à Ndjamena jusqu’à l’âge de 16 ans et la fin de son cursus de collège en 1970. Sa famille prend ensuite la décision de s’installer à Bangui où ses parents la confient à son oncle maternel Simon-Pierre Kibanda et à son épouse israélienne Sonia. Simon-Pierre Kibanda qui est alors secrétaire au ministère des Affaires étrangères - avant d’être nommé chef du protocole en 1971- a fait carrière dans la diplomatie. Catherine poursuit à Bangui sa scolarité au lycée Marie-Jeanne Caron et obtient son baccalauréat A4 au lycée d’Etat des Rapides en 1973.
Elle part ensuite étudier à Paris où elle étudie le journalisme et le droit jusqu’à un diplôme d’études supérieures spécialisées -DESS- en droit des assurances obtenu en 1981. Rédactrice dans une agence de la compagnie d’assurance Préservatrice - Foncière à Paris, elle est alors mariée avec Jean-Claude Sappot avec qui elle a trois enfants - Stéphane, Christelle et Jimmy -.
B. Parcours professionnel et associatif.
En 1984, Catherine rentre au pays et intègre l’entreprise d’Etat d’Assurances "SIRIRI". Après son divorce elle se marie en 1998 avec Cyriaque Samba-Panza qui est secrétaire d’Etat au plan, aux statistiques et à la coopération internationale depuis la fin de l’année 1987. Son époux est proche de l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Lebouder et d'Énoch-Dérant Lakoué - il sera Directeur de Cabinet de ce dernier lorsque celui-ci sera Premier ministre de février à octobre 1993 et vice-Président de son parti le Parti Social-Démocrate-. Cyriaque Samba-Panza et Catherine@sni
En 1989, Catherine Samba-Panza intègre la filiale du Groupe Allianz "AGF Centrafrique Assurances" où elle travaille jusqu’en 2007.
Elle fonde ensuite un cabinet de courtage -CSP Assurances-Conseils- puis rejoint la filiale de la société de courtage Gras Savoye en Centrafrique où elle est Directrice générale jusqu’en 2013.
Elle s’implique en au sein l’Association des femmes juristes de Centrafrique -AFJC-, devient vice-Présidente de cette association de 2001 à 2008 et adhère par ailleurs au Lion’s club, autant d’activités qui lui confèrent de plus en plus de visibilité dans la capitale centrafricaine. Catherine Samba-Panza@sni
C. Entrée en politique et nomination à la mairie de Bangui par Djotodia.
Catherine Samba-Panza -CSP- est nommée vice-Présidente du Dialogue National en septembre - octobre 2003. Elle s’y distingue en œuvrant à une scène de réconciliation entre les vieux ennemis David Dacko et Abel Goumba. Elle dirige ensuite le Comité de Suivi des Actes du Dialogue National jusqu’en 2007. Apprécié de François Bozizé, son mari Cyriaque est nommé ministre de l'Equipement et du Désenclavement dans le gouvernement du Premier ministre Touadéra en janvier 2008. Durant les élections législatives de 2011, Cyriaque souffre de nombreuses séquelles après une attaque cérébrale et c’est Catherine qui mène campagne sur le terrain pour lui dans la circonscription électorale de Bouca.
C’est Michel Djotodia qui offre à CSP son premier poste d’envergue.
Par décret N°13.101 du 20 mai 2013, celui-ci la nomme Présidente de la délégation spéciale de la ville de Bangui.
Pour expliquer cette nomination, il faut rappeler que Michel Djotodia - qui a comme lui étudié en URSS - fut contrôleur principal des finances au Secrétariat d’Etat au Plan, aux Statistiques et à la Coopération Internationale que dirigeait Cyriaque Samba-Panza à la fin des années 1980.
Par ailleurs, son Directeur de cabinet Mahamat Kamoun est en couple avec Rachel Ngakola, une très proche amie et parente du côté maternel de Catherine. CSP prend officiellement ses fonctions de Maire le 14 juin 2013, un poste qu’elle occupera moins de 7 mois.
Lors de l’un de ses déplacements en France, elle sera amenée à rencontrer le président français François Hollande lors de l’Assemblée des maires francophones à Paris le 15 novembre 2013, présenté par l’intermédiaire de Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la Francophonie… Yamina Benguigui et Catherine Samba-Panza@sni
2. Une transition sur fond de scandales.
A. Elue à la hâte Présidente de transition grâce à la France.
Un peu plus d’un mois après le début de l’opération Sangaris, juste après la démission de Michel Djotodia qui intervient le 10 janvier 2014, le Conseil National de Transition -CNT- est chargé d’élire à la hâte -seulement dix jours après la démission de Djotodia- le futur président de la transition. Mais ce n’est pas à Bangui que semble se jouer cette élection.
Le 17 janvier 2014, Denis Sassou-Nguesso qui est en déplacement à Paris reçoit dans la suite de son hôtel les ministres français des Affaires étrangères Laurent Fabius et de la Défense Jean-Yves Le Drian.
Le lendemain, Sassou s'entretient directement de cette élection lors d'une rencontre avec François Hollande à l'Elysée. Il devient rapidement évident à Bangui que Samba-Panza est soutenue par les Etats-Unis, la France et le Congo.
L’ambassadeur de France à Bangui Charles Malinas en poste depuis à peine un mois n’hésite pas à confirmer de vive voix à de nombreux conseillers nationaux de transition le soutien de la France à Catherine Samba-Panza...
Il faut préciser que Charles Malinas est l’ancien directeur de cabinet de Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la Francophonie plusieurs fois rencontrée par Catherine Samba-Panza au cours des derniers mois…
Catherine Samba Panza et Charles Milanas@pr
Alors que 24 dossiers de candidatures sont déposés, une sélection drastique est opérée par la Commission électorale spéciale du CNT selon 17 critères éliminatoires et seulement 8 candidatures sont finalement retenues la veille de l’élection. Au premier tour, CSP obtient 64 voix - une voix de moins que la majorité absolue, fixée par le CNT à 65 voix- et devance Désiré Kolingba qui recueille 58 suffrages.
Le 20 janvier 2014, Catherine Samba-Panza est finalement élue au second tour présidente de la transition devançant Désiré Kolingba par 75 voix contre 53. Elle prête serment le 23 janvier 2014 devenant ainsi la première femme présidente de l'histoire de la RCA, sans avoir jamais eu la moindre expérience gouvernementale auparavant. Selon le calendrier de la transition, des élections générales doivent désormais être organisées au plus tard au premier semestre 2015… Catherine Samba-Panza présidente de la transition accueille à Bangui,
Jean-Yves Le Drian ministre de la défense, Laurent Fabius ministre des Affaires étrangères et François Hollande président de la République française@sp/pr
B. Un gouvernement et des conseillers composés de proches et de parents.
La nomination d’un nouveau gouvernement 20 ministres et la désignation des membres du cabinet de la nouvelle présidente 29 conseillers au total, le 3 février 2014 laisse une large place à des proches ainsi qu’à des parents de la Présidente de transition. André Nzapayéké, un cadre du FPP - front patriotique pour le progrès - qui fut ministre du développement rural dans le gouvernement d’Enoch Derant-Lakoué sous Kolingba, ancien de la Banque africaine de développement - BAD- et vice-président de la Banque de développement des Etats d'Afrique centrale - BDEAC - est nommé Premier ministre.
Sur les 20 membres de son gouvernement, 8 sont parentés à la nouvelle présidente de transition :
- Isabelle Gaudeuille : ministre de la Justice et cousine de la présidente,
- Aristide Sokambi : ministre de l’Administration du territoire et cousin de la présidente,
- Florence Limbio : ministre de l’Économie et du Plan et cousine de la Présidente,
- Denis Wangao Kizimalé : ministre de la Sécurité publique et cousin de la présidente,
- Rémy Yakoro : ministre des Finances et du Budget et parent de Cyriaque Samba-Panza,
- Olivier Malibangar : ministre des Mines et parent de Cyriaque Samba-Panza,
- Éloi Anguimaté : ministre de la Fonction publique et beau-frère de la présidente,
- Marguerite Samba : ministre de la santé publique, épouse de l’ami intime d’Aristide Sokambi,
Léopold Samba, ambassadeur à Genève. Joseph Mabingui, anciennement Secrétaire général de la Présidence sous André Kolingba, directeur de cabinet d'Enoch Dérant Lakoué - lorsque ce dernier a géré en 2013 le Ministère de l’Économie, du plan - est nommé directeur de cabinet de CSP. S’ils se sont connus et fréquentés lorsqu’ils étaient étudiants à Paris, il faut noter que son épouse Pauline Akondja est directement parentée à la présidente de transition - du côté maternel-.
Christelle Sappot, la fille de Catherine Samba-Panza, jusqu’ici salariée au sein de la Société centrafricaine de cigarette - SOCACIG -, filiale du Groupe Imperial Tobacco à Bangui est nommée chef de cabinet particulier de la présidente de transition. Outre cette fonction, Christelle gère aussi les affaires financières de la Présidence disposant notamment d'un droit de regard sur les fonds spéciaux de la Présidence.
Le sulfureux Jean-Jacques Demafouth, cousin de Samba-Panza - côté maternel - est nommé conseiller spécial en matière de sécurité, chargé des relations avec MISCA, SANGARIS et EUFOR.
Enfin, notons que la proche amie de CSP, Yacinthe Wodobodé - ancien ministre de Bozizé- est nommée présidente de la Délégation Spéciale de la ville de Bangui le 7 février 2014. Yacinthe Wodobode présidente de la délégation spéciale de la ville de Bangui et Catherine Samba-Panza présidente de la transition@arch2014
C. La prédation s’ajoute à l’inexpérience et au manque de résultats.
Si son élection suscite un immense espoir, le manque d’expérience de la présidente se ressent très vite à tel point que celle-ci semble ne plus rien maîtriser dès la fin du premier trimestre 2014. Elle ne parvient pas à enrayer l'insécurité ni à gérer les priorités, notamment le redressement des finances publiques.
Le tandem Samba-Panza - Nzapayéké montre clairement ses limites alors que le cabinet présidentiel, sorte de "gouvernement bis", formé de 29 conseillers - dont certains ont rang de ministre- paralyse l’action de l’exécutif par d’incessantes rivalités. Ce vide permet notamment à certaines personnalités comme son parent et conseiller en charge de la sécurité Demafouth de gagner en influence et d’outrepasser ses attributions. Ce sentiment de flottement est unanimement partagé au sein de la société centrafricaine mais aussi dans les capitales sous-régionales participant à la MISCA au général sénégalais Babacar Gaye en passant par les Etats-majors.
Les violences continuent d'embraser sporadiquement Bangui - comme le 28 mai 2014 lorsque 17 personnes sont tuées à l’église Notre-Dame de Fatima - et l’arrière-pays, faute de désarmement tandis qu’aucun plan n’est esquissé pour améliorer le sort des milliers de réfugiés.
De plus en plus critiquée, Samba-Panza montre des signes d’agacement, notamment vis-à-vis de la presse. Le 7 avril 2014, le directeur de publication du quotidien Le Palmarès est arrêté après la parution d’un article jugé diffamatoire. Une semaine plus tard, son homologue du journal Le Peuple subit le même sort.
Les premiers scandales voient le jour :
- Le fils ainé de CSP Stéphane Sappot - dont les multiples frasques à Bangui et en France marqueront la transition-.
- De nombreux permis forestiers dans le Sud-Ouest du pays sont attribués dans des conditions opaques - groupe Timberland industries / Sesame à Nola, STBC / STBK à Bayanga, Alpi / Alpica puis Wicwood / Sinfocam à Salo- laissant apparaître clairement des signes de prédation de l’équipe dirigeante.
- Le secteur des télécoms n’est pas en reste. Le contrat passé entre la société EIG - aussi dénommée Zeus Télécom- pour la gestion de la Gateway Unique pour les appels internationaux présente ainsi de graves irrégularités - exclusivité et conflit d’intérêt manifeste pour la gestion et la supervision de la Gateway-.
- En nommant le sulfureux homme d’affaires français Laurent Foucher comme ambassadeur de la Centrafrique auprès de l’ONU en Suisse, en lui octroyant un passeport diplomatique centrafricain et un poste de conseiller économique auprès de la présidence de la République, la présidente de transition n’hésitera pas à monnayer une position diplomatique de haut niveau à ce ressortissant étranger dont la fortune estimée à près de 300 millions d’euros…
- Notons aussi le cas de Dédé Vianney Mboe, époux de la sœur de CSP qui prodigue alors ses onéreux conseils juridiques aux autorités de transition et ses conseils patrimoniaux à Catherine Samba-Panza et son proche entourage malgré qu’il ait été radié à vie du barreau d’Orléans et condamné à trois ans de prison ainsi que le paiement de 90 000 euros de dommages et intérêts - peine confirmée en appel en octobre 2012-.
Si ces exemples sont autant de mauvais signaux relevés par les observateurs de la vie politique, c’est surtout le scandale du "don angolais" qui va éclabousser la transition. A Luanda, Catherine Samba-Panza et Eduardo Dos Santos@arch2014
Le 4 mars 2014, CSP se rend à Luanda et le président Dos Santos accepte d’octroyer un don de 10 millions de dollars à la RCA pour renflouer les caisses du Trésor Public et permettre le paiement du salaire des fonctionnaires. La moitié de cette somme est alors remise en liquide, dans des valisettes à la présidente de transition.
Christelle Sappot@rge
De retour à Bangui, CSP remet elle-même les 5 millions de dollars en liquides à sa fille Christelle Sappot, à Mahamat Kamoun, son conseiller spécial et à Robert Bokoyo, Directeur adjoint du Trésor avec pour consigne d’aller les échanger contre des Fcfa à Douala.
Le ministre des Finances Rémi Yakoro pourtant unique ordonnateur des finances de l’État est tenu à l’écart de toute cette transaction...
Lorsque la deuxième tranche du don angolais - les autres 5 millions de dollars- parvient à la Présidence, Christelle Sappot la remet au directeur général du trésor Gabriel Madenga le 28 avril, lequel transfère aussitôt la somme sur le compte centrafricain à la BEAC, via Ecobank.
À nouveau, le ministre des Finances, Rémi Yakoro est tenu à l’écart et ne sera informé qu’a posteriori, deux jours plus tard, par un courrier du DG du Trésor... Soucieux de ne pas devenir le bouc émissaire de cette affaire, Rémi Yakoro révèlera que la seconde moitié de la seconde tranche de 2,5 millions de dollars - soit l’équivalent de 1,132 milliard de Fcfa- s’est évaporée…
Après ces révélations, le scandale enfle à Bangui : partis politiques, société civile, bailleurs internationaux exigent des explications. Joseph Mabingui, Directeur de Cabinet de la Présidente confectionne alors un tableau daté du 14 juillet 2014, dans lequel il est vaguement expliqué que l’argent manquant a été utilisé sous forme de "fonds politiques" par la Présidence et la Primature. Il devient alors évident que ces fonds non comptabilisés au sein du compte courant du Trésor à la BEAC ont été détournés …
3. Des élections maintes fois repoussées et finalement truquées.
A. Un remaniement en plein "AngolaGate" sur fond de violences.
Alors que s’achève le 27 juin 2014 à Malabo le 23e sommet de l’Union africaine, Samba-Panza participe à une réunion informelle sur la Centrafrique organisée par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale -CEEAC-.
Elle y présente son bilan dans une ambiance tendue avant … d’être priée par ses pairs de quitter la salle.... C'est dans un couloir près du lieu de la réunion que la présidente de transition doit attendre la fin des concertations... Le communiqué final publié à l'issue de la rencontre annonce "sa volonté de remanier son gouvernement" … Catherine Samba-Panza@ceeac
Du 21 au 23 juillet 2014, un sommet est convoqué à Brazzaville pour obtenir un cessez-le-feu officiel entre groupes armés. Cette réunion et un remaniement de l’équipe gouvernementale apparaissent alors comme les derniers moyens pour Samba-Panza de sauver la face devant les critiques de plus en plus fortes à son endroit... André Nzapayéké et Catherine Samba-Panza@sni
Le Premier ministre Nzapayéké doit se résoudre à démissionner mais exige en échange des contreparties : il obtiendra près de 300 millions de Fcfa et le poste d’ambassadeur de RCA en Afrique du Sud qu’il occupe encore aujourd’hui…
Le 10 août 2014, Catherine Samba-Panza désigne pour le remplacer Mahamat Kamoun - ancien directeur de cabinet de Michel Djotodia. La compagne de ce dernier Rachel Ngakola - cousine de CSP du côté maternel - qui est nommée au poste de Directrice générale des douanes centrafricaines se distinguera par une gestion particulièrement prédatrice des recettes douanières… Catherine Samba-Panza et Mahamat Kamoun@pm/sp
Face aux bailleurs de fonds internationaux mais aussi à José-Eduardo dos Santos, qui la convoque le 20 août 2014 à Luanda pour une brève séance d’explications sur l’utilisation des fonds alloués, la présidente de transition plaide la bonne foi et l’urgence de la situation, sans que ses interlocuteurs ne soient dupes quant à l’utilisation des 2,5 millions de dollars…
A Paris, l’on observe ce désordre avec crainte car la priorité est avant tout de se désengager au plus vite du théâtre d’opération centrafricain. Hélène Le Gal, conseillère Afrique de François Hollande vient à Bangui le 6 octobre 2014 pour recadrer CSP lui rappelant clairement qu’elle doit respecter le chronogramme relatif à l’organisation des prochaines élections qui doivent théoriquement se tenir au printemps 2015...
Pour les centrafricains, l’"Angolagate" est le catalyseur de la crise morale qui secoue la transition de Samba-Panza. La population descend dans la rue pour réclamer sa démission et des violences secouent Bangui. les manifestants demandent la démission de CSP@sni
Depuis New-York où elle participe à une réunion sur la RCA en marge de l’Assemblée générale des Nations-Unies, CSP semble au bord de la rupture. Des violences intercommunautaires secouent Bangui et Bambari début octobre 2014 faisant plusieurs dizaines de morts. On assiste à un affrontement larvé entre la cheffe de l’État et Alexandre-Ferdinand Nguendet, le président du CNT qui annonce en grande pompe une enquête sur l’affaire du don angolais. Cette enquête sera finalement abandonnée avec l’intervention de Sassou-Nguesso après que Samba-Panza avoue dans une déclaration publique "n’avoir pas utilisé l’argent toute seule" et menace dans l'hypothèse d'une enquête d’exposer les noms des responsables mouillés dans cette affaire…
B. Le forum national de Bangui et les reports successifs des élections.
Alors que la date du scrutin initialement prévu pour le début de l’année est repoussée à l’été 2015, CSP s’active pour préparer le forum national de Bangui censé réconcilier les centrafricains avant ce scrutin. Au début du mois d’avril 2015, elle signe trois décrets portant nomination du présidium du Forum, des membres du Comité technique et fixant les dates du dialogue national.
Le CNT s'élève alors contre ces décisions, accusant la présidente de pas l’avoir consulté et les critiques se cristallisent sur le choix du très controversé Jean-Jacques Demafouth comme coordinateur du comité technique. Béatrice Epaye qui présidait la commission préparatoire du Forum en est limogée. Beaucoup reprochent à Catherine Samba-Panza de vouloir noyauter les débats du Forum et menacent alors de le boycotter. Finalement, la ministre de la Santé Marguerite Samba remplace Demafouth à la place du comité technique, la composition des comités est revue et tous les membres sont choisis par consensus. Lors de ce Forum qui se déroule du 4 au 11 mai 2015, les autorités de transition sont sévèrement critiquées. Les débats permettent d'entériner une nouvelle prolongation jusqu’aux élections qui sont reportées au 18 octobre 2015…
Mais les violences s’intensifient. Le 20 août 2015, plus de vingt personnes sont tuées et plusieurs dizaines blessées dans des violences intercommunautaires qui éclatent à Bambari provoquant des déplacements importants de populations.
Le 26 septembre 2015, l’assassinat d’un conducteur de moto-taxi au PK-5 provoque une flambée de violences qui fait une quarantaine de morts et une centaine de blessés. On assiste à des scènes de pillages et des barricades sont érigées dans plusieurs quartiers de la ville. Des manifestants demandent le départ des troupes de l’opération Sangaris et de la MINUSCA ainsi que celui de la présidente de la transition. Des milliers de personnes sont déplacées et l’on assiste même à une évasion de centaines de détenus de la prison centrale de Bangui. Samba-Panza qui est obligée de quitter précipitamment New-York où elle participe à la 70e Assemblée générale des Nations-Unies qualifie ces évènements de "tentative de coup d’Etat" .
Ce regain de tensions pousse à s’interroger : à qui profite le crime ? La conséquence est en tous cas qu’une nouvelle date doit être fixée pour la tenue du premier tour des élections, cette fois au 13 décembre 2015…
C. Le trucage des élections présidentielles de 2015-2016.
Lors des élections présidentielles de 2015-2016, Constant Gouyomgbia-Kongba-Zeze - dont l’une des filles Cynthia est secrétaire à la Présidence - bénéficie du soutien de Samba-Panza. Rachel Ngakola, Directrice générale des douanes gère ses comptes de campagne et celui-ci bénéficie ainsi d’importants moyens de communication - jusqu’à 3 millions de Fcfa par semaine...-. Cela n’empêche pas ce candidat qui s’est distingué par d’importants détournements lorsqu’il était Directeur général de la Caisse d’Amortissement des Dettes de l’Etat - CAADE - de n’obtenir que 0,49% des voix au premier tour de ces élections… Charles Malinas ambassadeur de France en Centrafrique Elisabeth Guigou présidente de la commission des Afffaires étrangères à l'Assemblée nationale de la France
et Catherine Samba-Panza présidente de la transition du Centrafrique@pr/sp
Derrière le soutien de cette candidature en trompe l’œil, les autorités de transition organisent un vaste système de fraude validé par l’ambassadeur de France à Bangui Charles Malinas en faveur de Faustin-Archange Touadéra. C’est Joseph Mabingui le Directeur de cabinet de la présidente et ami de longue date de Touadéra qui appuie ce choix, facilité par le fait que son épouse Brigitte Touadéra née Béléma est Banziri.
Jean-Jacques Demafouth nommé par un décret muet de CSP "superviseur général des élections" chapeaute en toute illégalité le travail de l’Autorité Nationale de Elections. On assiste alors à des cas de fraudes extrêmement graves : distribution massive de bulletins de vote préremplis, existence de bureaux de vote fictifs, modification de procès-verbaux par des responsables administratifs ou encore au vote d’électeurs dépourvus de tout document d’identité…Autant de manœuvres qui expliquent ce score très surprenant de Touadéra - loin de faire partie des favoris de ce scrutin - au premier tour de ces élections. Les autorités de transition continuent sur leur lancée durant l’entre-deux-tour.
Le ministre des Finances, Abdallah Kadre et de Rachel Ngakola font ainsi réquisitionner un avion de la compagnie Minair déjà loué par son concurrent pour aller battre campagne dans l’arrière-pays…L’ensemble de ces moyens mis en œuvre au profit d’un candidat approuvé par l’ambassadeur Malinas permettent de parler de trucage des élections par les autorités de transition alors que celles-ci étaient chargées de les organiser en toute impartialité… Signalons aussi le cas de la cinquantaine de véhicules offerts par l’Angola dans le cadre de l’élection présidentielle qui après avoir été stockés à Yaoundé par l’entourage de la Présidente vont se volatiliser…
Juste avant de quitter ses fonctions, Catherine Samba-Panza nomme par le décret sa fille Christelle comme ambassadrice "extraordinaire et plénipotentiaire de la RCA" en Guinée équatoriale, une nomination que ne remettra d’ailleurs pas en question Touadéra une fois installé sur le fauteuil présidentiel…
Lors de l’investiture du nouveau président "élu", Samba-Panza arrive sous les huées des banguissois clôturant ainsi d’une bien triste manière cette période... Un audit de cette transition réalisé par la Cour des comptes met en lumière un certain nombre de dossiers détournements et de malversations commis sous la Présidence Samba-Panza. Les conclusions de cet audit, qui sur instructions de l’exécutif pourraient prochainement filtrer, ne cessent de donner des sueurs froides à l’ex-cheffe de l’Etat qui ne cesse de se plaindre de cette situation en affirmant en privé comme en public que sans elle "Touadéra n’avait aucune chance d’être au second tour…" le jour de l'investiture Catherine Samba-Panza félicitant Faustin-Archange Touadera@archmars2016
Par l’intermédiaire de son parent Calixte Mbari, chef de la division "démocratie, Etat de droit et des élections" de la Commission de l'Union africaine, Samba-Panza se reconvertira au sein de l’Union africaine. Elle a ainsi conduit pour le compte de la Commission de l’Union africaine, des missions d’observation électorales au Sénégal et en Côte-d’Ivoire et co-préside le réseau des femmes médiateurs de l'Union africaine -FemWise-Africa-. Catherine Samba-Panza observatrice au Sénégal@ua/prs
Dans une interview octroyée au journal Jeune Afrique le 22 mars 2016, lorsqu’on lui demande si elle pourrait envisager de se représenter aux prochaines élections, Catherine Samba-Panza répond "dans cinq ans, j’aurai un certain âge et je préférerais avoir une activité moins stressante : je ne suis pas de ceux qui, à 75 ans, veulent se présenter ! Et puis la politique, ce n’est pas mon truc…"
Gaston Madenga
Reproduction autorisée en précisant la source : centrafriqueledefi@cld
Le 25 juin 2020