Avec le projet de loi bioéthique autorisant la PMA pour les femmes seules et les couples de femmes, ce n’est plus l’exception qui confirme la règle, mais la règle qui s’aligne sur l’exception, analyse le général Bruno Dary.
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Le projet de loi actuel sur la bioéthique, étudié en 2e lecture à l’Assemblée nationale, dans la torpeur de l’été et alors que la France peine à sortir de l’épisode du Coronavirus, est un exemple d’une dérive, relativement récente, mais insupportable de la société moderne, que l’on pourrait qualifier comme étant "la tyrannie des minorités".
Alors que nous vivons dans une démocratie qui se veut exemplaire, la règle qui devrait réguler la marche de notre société reste le vieil adage romain : "vox populi, vox dei" ; il sous-entend que c’est la voix du plus grand nombre qui est prise en compte dans la vie politique, comme l’est le suffrage universel, ou dans l’évolution des lois, en particulier au cours des débats et des textes votés à l’Assemblée nationale. Et un autre vieil adage vient en écho à ce principe républicain, car il y a toujours eu des cas particuliers : "c’est l’exception qui confirme la règle", laissant ainsi à tout responsable la liberté de faire preuve d’un discernement de bon aloi dans la mise en œuvre de la règle générale ! Or depuis quelques années, c’est l’inverse qui se passe. Désormais, c’est l’exception qui fait la règle, selon un processus quasi immuable et bien établi : une exception, une émotion, une victimisation, une médiatisation, une législation et enfin une généralisation.
Notre société vit en permanence sous le signe de l’instantanéité et de l’émotion.
Tout démarre avec un incident, aussi insignifiant soit-il, mais qui doit s’inscrire dans ce que l’on peut appeler l’ère du temps ou le politiquement correct : un gendarme tué lors d’un contrôle routier et une personne âgée, agressée devant un distributeur de billets n’entrent pas dans cette catégorie, alors que ces faits sont malheureusement fréquents ! En revanche, un étranger qui perd la vie au cours d’une manifestation ou d’un contrôle de police, fait anormal mais extrêmement rare, est immédiatement l’objet d’un scoop ; de même que l’élève d’un lycée militaire accusé de harcèlement envers une jeune fille de sa classe. L’exception peut aussi être la revendication d’un groupe minoritaire, seule concerné par l’évolution d’une loi de portée nationale, comme actuellement la PMA pour les couples de femmes.
La phase suivante de ce cycle est l’émotion, car nous vivons dans une société, qui se dit ou se voudrait raisonnable, mais qui manque manifestement de recul sur l’événement, et vit en permanence sous le signe de l’instantanéité et de l’émotion. Les propos récents et surprenants de l’ancien ministre de l’Intérieur sont révélateurs : alors qu’aux yeux du gouvernement et du peuple français, il est le premier garant du respect des lois et de l’ordre public, il a déclaré devant les médias, pour excuser les débordements liés à l’affaire Traoré : "leur émotion l’emporte sur les règles de droit qui s’appliquent" …
Il s’agit ensuite de faire reconnaître la personne impliquée dans cet incident ou dans cet accident comme une "victime"; depuis plusieurs dizaines d’années, en effet, nous vivons dans le temps des victimes ! Et être reconnu comme telle présente un triple avantage pour la personne qui revendique cet état, avantage que personne ne pourra ni contredire, ni chercher à contester : tous les micros lui seront tendus et elle fera la une de nombreux journaux; elle pourra tout dire et tout affirmer, les éventuels antagonistes ne pouvant au mieux se justifier; et enfin, personne ne pourra rien dire pour s’opposer à ses allégations ou à sa lecture des faits. Et comme la personne reconnue comme victime est la première à s’exprimer, elle entre alors dans le temps de la médiatisation !
Après l’impact de la médiatisation, viendra celui de la législation.
Aujourd’hui, dès qu’une information, surtout sous forme de photos ou de vidéos, est mise sur internet, plus rien n’arrête sa diffusion à travers le monde entier ; bien sûr, les médias constituent un acteur essentiel, mais ils ne sont plus les seuls; blogs et réseaux sociaux jouent un rôle tout aussi amplificateur ! En outre, il faut faire vite et court, et comme personne n’a beaucoup de temps, il s’agit de s’en tenir à une approche simple, voire simpliste, et surtout manichéenne. Et avec la mort tragique et honteuse de George Floyd, un nouveau pas a été franchi dans la médiatisation, car ce décès, qui s’est passé de l’autre côté de l’Atlantique, sur un autre continent, dans un pays étranger, dont les us, coutumes et lois sont bien différents des nôtres, a fait l’objet d’un traitement médiatique, comme s’il était survenu en France….
Et puis, après l’impact de la médiatisation, viendra celui de la législation : pour qu’un tel fait, même exceptionnel, ne puisse se reproduire, et au nom du principe de précaution, il s’agit de légiférer. Mais ce peut être aussi une minorité - forcément victime - mais absolument pas représentative de l’opinion publique du pays, qui cherche à jouer sur une déclaration ou un discours présidentiel pré-électoral, et s’appuie souvent sur un lobby, pour déposer un projet de loi. Au nom des droits de l’homme et surtout de l’individu, car de nos jours, les droits de la personne passent avant ceux de la communauté et de la société, il se trouve toujours un mouvement politique pour porter un tel projet de loi. Il suffit ensuite de s’appuyer sur la discipline parlementaire pour que ce projet se concrétise ; chacun a pu voir récemment que celui - ou celle - qui a le courage de s’opposer au projet au sein du parti au pouvoir était rapidement discréditée… Antigone n’est décidément pas une héroïne moderne !
De nouvelles mesures s’appliqueront à tous alors qu’à l’origine, une seule personne ou un seul groupe était en cause.
Et enfin, comme les mœurs suivent la loi, ces dérives ou ces exceptions deviennent progressivement la règle commune, voire une habitude, puisque c’est autorisé par la loi…. Ainsi de nouvelles mesures, qu’elles soient contraignantes ou au contraire liberticides, s’appliqueront à tous alors qu’à l’origine, une seule personne ou un seul groupe était en cause. C’est bien l’exception qui a fait la règle.
Le projet de la loi sur la bioéthique a suivi un scénario identique : alors qu’une très large majorité de l’opinion publique est plus préoccupée par la sécurité quotidienne ou la sortie de la pandémie, ce projet en élargissant la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules, ne concerne en fait qu’une infime minorité de la population, tout en oubliant ou négligeant les plus faibles, à savoir les enfants à naître qui seraient alors privés pour toujours de leur père….et sans évoquer les dérives eugéniques.
Le Général d’armée ( 2s ) Bruno Dary est le Président du Comité de la flamme sous l’Arc de triomphe. - Paris - France
Le 30 juillet 2020