Jean-Marie-Michel Mokoko@sni
Le général (2s) Jean-Marie-Michel Mokoko, qui fût candidat à l'élection présidentielle de 2016 contre Denis Sassou-Nguesso, vient d'être condamné par la cour d'appel de Brazzaville, vendredi 11 mai 2018 en début de soirée à 20 années de prison ferme.
La même peine est requise pour ses 7 co-accusés. L'ancien chef d'état-major a été reconnu coupable d'atteinte à la sûreté intérieure et de détention illégale d'armes et munitions de guerre.
C'est le visage grave que Jean-Marie-Michel Mokoko a accueilli ce verdict, regardant le président de la cour dans les yeux, impassible, lui qui ne s'est quasiment pas exprimé au cours de ce procès.
Les 7 co-accusés du général, soit 6 français et un congolais présenté comme des mercenaires écopent de la même peine, mais par contumace, car ils n'étaient pas présents à l'audience.
Tous ont été reconnus coupables d'avoir ensemble tenté en 2006, 2007, 2015 ou 2016 de porter atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat, "soit dans le but de détruire ou changer le gouvernement, soit en incitant les citoyens à s'armer contre l'Etat du Congo." Ces 7 co-accusés sont aussi condammés à payer 1 franc symbolique à l'Etat qui s'est constitué partie civile dans ce dossier au titre de dommages et intérêts.
Né le 19 mars 1947 à Mossaka dans la Cuvette, le général Mokoko avait choisi de garder le silence.
Il n'y a donc pas eu de débat contradictoire à ce procès, les éléments de preuve présentés par le procureur n'ont pas pu être discutés et seule l'accusation s'est exprimée vendredi 11 mai 2018 en matinée au cours des plaidoiries.
Il est souvent reproché les lenteurs de l'administration mais dans ce cas précis, la justice de la République du Congo a tenu ce procès en 4 jours rassemblant 3 témoins à la barre suivi de 2 heures de délibération pour une condamnation de 20 années de prison au 8 prévenus.
Maître Norbert Tricaud l'un des avocats du général Mokoko constate "la rapidité révélatrice d'un dossier sans preuve". La défense a répondu que la faute est "la conséquence de la stratégie du silence". Maitre Devilliers représentant l'Etat du Congo de poursuivre en haraguant "A quel spectacle avons-nous assisté ? Le spectacle, permettez-moi de le dire, un peu pitoyable d’un dignitaire de la République qui aura refusé de s’expliquer devant ses juges".
De son côté le procureur de la République a martelé "Il y a anguille sous roche"ajoutant "ce silence est un aveu de culpabilité".
Pour sa part Maître Okoko, l'un des avocats de l'Etat du Congo, a lancé "ce n'est pas un dossier vide mais consistant en citant des extraits de procès-verbaux" poursuivant "Il faut que ceux qui suivent ce dossier sachent ce qu'il y a dedans, a-t-il plaidé, sinon nous l'aurons survolé.
Maître Jean-Philippe Esseau, l’un des avocats du général Mokoko, a dit "nous considérons que Jean-Michel-Marie Mokoko ne peut pas être poursuivi en vertu de son immunité. Il est détenu à la maison d’arrêt d’une manière arbitraire. Cette décision n’a pas de valeur." Maître Esseau d'insister "cette stratégie du silence n’était pas un aveu de culpabilité, mais qu’il s’agissait des principes de la République."
Les avocats de Jean-Marie-Michel Mokoko, dénoncent un procès politique, et ont saisi le comité des Nations-unies sur les détentions arbitraires. Les avocats ont 3 jours pour décider de se pourvoir en cassation.
Une certitude c'est tout de même Denis Sassou-Nguesso président de la République du Congo qui l'a nommé à une époque donnée chef d'Etat-major des armées et ensuite "l'envoyé spécial" à Bangui à l'époque de la transition entre 2014 et 2016 et en ce sens il est évident que Jean-Marie-Michel Mokoko a bénéficié des largesses de l'actuel président.
Comme disait le célèbre corse Jean Tibéri, ancien député et ancien maire de Paris : "En politique on aime pas les créanciers" .
Le 11 mai 2018
Pour mémoire
À la fin du mois de juillet 2015 le général Mokoko alors en poste à Bangui pour le compte de l'Union africaine et parallèlement toujours conseiller du président Denis Sassou-Nguesso en matière de sécurité se prononce contre le changement de la Constitution qui devait permettre au président de la République en poste de briguer un 3e mandat.
Dans la foulée sa popularité devient grandissante. Originaire de la même région que le président de la République sortant, officier général comme lui, il apparait alors comme son adversaire le plus redoutable. Ses déclarations sont photocopiées et revendu dans la rue. Le 9 février 2016, alors qu'il quitte le Centrafrique, pour venir officialiser sa candidature à l'élection présidentielle anticipée du 20 mars 2016 Jean-Marie Michel Mokoko est accueilli à l'aéroport international de Maya-Maya à Brazzaville par des jets de pierres et de gaz lacrymogènes lancés par une milice proche du pouvoir de Brazzaville.