Le régime autocratique du président Ismaïl Omar Guelleh a cédé à la pression publique et abaissé le prix des uniformes scolaires pour les élèves de l’enseignement élémentaire, mais cela est perçu comme de la poudre aux yeux pour détourner l’attention d’autres problématiques majeures touchant ce pays pauvre d’Afrique orientale.
Le ministre de l’éducation, Moustapha Mohamed Mahamoud, a annoncé que les parents débourseront quelque 2 000 francs Djibouti -DJF- soit 171 R ou 11,25 dollars, au lieu des 3 500 DJF initialement prévus.
Avec un taux de chômage - un problème chronique - qui avoisine les 60 % dans les zones urbaines, le prix initial de ces uniformes était perçu comme astronomique.
Selon les analystes, l’annonce faite ce lundi, jour de la rentrée scolaire 2018/19, n’est qu’un leurre du gouvernement pour détourner l’attention de son échec patent à rendre les écoles accessibles à la jeunesse, de la sécheresse endémique, de l'insuffisance des installations sanitaires et de l’insécurité alimentaire ; autant de problèmes persistants malgré les prêts financiers massifs qui affluent dans les caisses de l’État.
Les critiques mettent ces problèmes sur le compte du train de vie extravagant de M. Guelleh, au pouvoir depuis 1999 après le décès de son oncle Hassan Gouled Aptidon, qui était à la tête du pays depuis son indépendance de la France en 1977.
Son administration est synonyme de brutalités à l’encontre de l’opposition et des médias, de discrimination à l’égard des personnes handicapées, ainsi que de restrictions des droits des syndicats.
"L’annonce de la réduction du prix des uniformes n’est que de la poudre aux yeux en réponse aux critiques concernant les goûts dispendieux d’un gouvernement confronté à des défis sociaux grandissants", déclare l’analyste politique Beran Omar.
M. Mahamoud dépeint quant à lui une administration attentive aux difficultés qui affectent la population. M. Mahamoud a déclaré que le prix des uniformes avait été diminué à la suite des revendications parentales entendues par M. Guelleh. "Il a donné des consignes précises dans ce sens", souligne le ministre.
Mais, malgré le prétendu engagement gouvernemental en faveur de l’éducation, le taux net d'inscriptions dans l'enseignement primaire, qui représente le pourcentage d’enfants officiellement en âge d’être scolarisés inscrits dans une école primaire, se situe aux alentours des 60 %, selon les derniers chiffres de la Banque mondiale.
Ce chiffre révèle une situation encore plus préoccupante : les taux d’inscription plus bas et les taux d’abandon plus élevés chez les filles, les élèves vivant dans les zones rurales et les enfants les plus démunis.
"Djibouti n’est pas en bonne voie pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement et son faible niveau en termes d’accès et de qualité de l’éducation risque de perdurer pendant des années encore", indique la banque mondiale.
Petit pays d’un peu moins d’un million d’habitants, Djibouti est en proie à une flambée de maladies d’origine hydrique et à un déficit alimentaire chronique. Le pays souffre également des conséquences du passage du cyclone Sagar qui a ravagé la région en mai et dont la Somalie, son voisin du sud-est, avait été l’épicentre.
Les inondations ont touché au moins 15 % de la capitale. Les écoles et d’autres infrastructures publiques n’ont pas été épargnées, les dégâts sont estimés à 30 millions de dollars. Parmi les 200 000 personnes touchées par la sécheresse, environ 20 000 sont des enfants de moins de 5 ans.
Djibouti présente l’un des taux de malnutrition infantile les plus élevés au monde, ce fléau affecte particulièrement les enfants de moins de cinq ans vivant dans les zones rurales.
Le 11 septembre 2018