La crise centrafricaine qui semblait résolvable avec le retour de l’ordre constitutionnel perdure malheureusement suite à l’intensification de la violence et l’embrasement tous azimuts du territoire et surtout avec la transhumance des seigneurs de guerre suivi de conflits dans des zones non encore touchées. Bernard Selemby Doudou@bsd
En dépit de la volonté affichée des nouvelles autorités, les erreurs d’approches, de stratagèmes et de stratégies ont conduit inévitablement le pays sur une voie sans issue. Les pays de la sous région, la communauté internationale ainsi que les communautés religieuses ont initié des accords de paix mais ces derniers peinent à produire les effets escomptés. Les réalités de terrain finissent par démentir les initiateurs et acteurs de ces différents accords. Lassée, l’Union africaine s’est invitée dans l’arène à travers la feuille de route de Libreville pour imposer un mécanisme de sortie de crise soutenu par le jeune president français. Face à la recrudescence de violences sanglantes et suite au constat d’un expert de l’ONU qui qualifiait la situation centrafricaine de pré-génocide, le secrétaire général et patron de la structure onusienne a pris la résolution pour sa première sortie depuis son élection en janvier de sonder le terrain lui même, en se rendant personnellement en Centrafrique.
Un chronogramme orienté pour les besoins de la cause a été établi par les autorités centrafricaines car le choix de visite de la ville de Bangassou au lieu de Kembé ou Pombolo ( récent théâtre de combats ) a été fait à desseins. Le citoyen lambda, toujours animé par le souci de connaître et de comprendre l’après Gutteres s’imagine de probables scénarios en s’interrogeant :
Qu’est-ce qui va réellement se passer ou changer après le départ du secrétaire général de l’ONU ?
À qui profitera cette longue visite de travail de quatre jours ?
Dans le chapitre des scénarios, si le patron de l’ONU en complicité avec notre traditionnel partenaire privilégié décide de sauver ou de protéger le peuple centrafricain au détriment du President de la République en se posant ces épineuses questions :
comment avez-vous fait pour ne contrôler que 20% du territoire depuis votre élection ?
L’avez-vous hérité dans cet état calamiteux ?
À qui incombe juridiquement la faute ou la responsabilité ?
Ainsi fort de ces interrogations, on assistera probablement à la mise à l’écart du pouvoir actuel qui se matérialisera par une transition militaire ou civile, ce qui explique toutes les gesticulations qui ont motivé la manifestation du 9 septembre, place de la République à Paris avortée ou annulée contre des billets de banque.
Ainsi, suivra la remise en scelle des deux précédents locataires du palais de la renaissance pour prendre part au processus de démobilisation, désarmement, réinsertion et rapatriement ( DDRR ).
Ce processus transitionnel serait sanctionné par des échéances électorales anticipées en 2019.
Les bourreaux du peuple centrafricain seront vraisemblablement amnistiés et leurs avoirs ne seront pas gelés confirmant ainsi les termes de la feuille de route de l’Union Africaine signée à Libreville. Ainsi, pourquoi gaspiller des efforts pour instituer la Cour pénale spéciale ?
Les différents déplacements du president de la République au Liban, Israël etc dérangent ou inquiètent-ils les intérêts occidentaux ?
La présence de l’ancienne présidente de la transition lors de la venue du secrétaire général de l’ONU est-elle un début d’explication à ces éventuels scénarios ?
Par contre si l’ONU décide le contraire c’est-à-dire opte pour sauver le soldat en perdition, l’ONU serait contraint d’appliquer désormais la résolution 2149 du 10 avril 2014 dans son intégralité et plus précisément l’article 30 relatif au désarmement, cantonnement, réinsertion…le dispositif militaire serait ainsi renforcé en effectifs et en matériels, la MINUSCA deviendrait en conséquence une force d’imposition de la paix comme a été le cas à Bocaranga.
Par ailleurs, on assistera inévitablement à la levée de l’embargo par le conseil de sécurité de l’ONU et la réhabilitation effective, progressive des forces armées centrafricaines formées et outillées. Le territoire national connaîtra enfin une pacification progressive et l’autorité de l’Etat de déploiera en conséquence.
Ainsi, le president de la République pourra in fine appliquer sainement son programme de société sur la base duquel il a été élu. Mais attention, ne le dîtes à personne. Si on vous demande, ne dîtes pas c’est moi.
Bernard Selemby Doudou
Juriste, administrateur des élections.
Melun le 27 octobre 2017.