Le député Karim Meckassoua interdit "de prise de parole" lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale.... Karim Meckassoua @
- Mesdames et Messieurs les journalistes,
- Bien chers compatriotes,
Notre pays va mal. Chaque centrafricain le voit et la plupart de nos compatriotes le sentent dans leur chair ou dans leur vie.
Dans ces circonstances, le Député de la Nation que je suis se doit d’interpeler le gouvernement, l’appeler au sursaut positif, et l’exhorter à cesser avec les pratiques qui ne font pas avancer le pays.
C’est le sens de la Déclaration -qu’il m’a été refusé de faire- à l’Hémicycle.
Pour dire quoi, chers compatriotes ? Essentiellement ceci :
Notre pays aspire plus que jamais à la liberté, à l’indépendance véritable, à la paix, à la justice et à la prospérité.
Mais comment assurer la liberté de notre Peuple quand les autorités légitimes de notre Etat renoncent elles-mêmes à leur liberté ? Quand ces autorités se placent entre des mains étrangères au lieu de celles que les centrafricains ont choisies ? Quand ces autorités pactisent avec des étrangers qui occupent notre territoire ?
Comment garantir l’indépendance de notre pays et de notre Nation quand ses chefs remettent notre sort entre les mains de puissances extérieures qui n’ont reçu ni mandat ni autorité du peuple souverain ?
Comment réaliser la paix pour notre peuple quand les décisions courageuses que cela implique ne sont pas prises ? Quand le pouvoir de décision sur une large portion de notre territoire est laissé à la discrétion de groupes de mercenaires étrangers ?
Comment promouvoir la justice pour tous, à commencer par les victimes de la crise, si les institutions et le corps judiciaires sont transformés en instruments de protection du pouvoir personnel et en arme de répression politique de l’opposition ?
Enfin, comment assurer la prospérité pour tous quand le pays est mis en coupe réglée au profit des tenants du pouvoir, de leurs familles et de leurs "amis" ? Quand la richesse nationale est captée par quelques-uns et utilisée à des fins personnelles, moyennant la corruption de nos institutions et de notre jeunesse, et au prix de l’augmentation de la misère dans le pays ?
Le pouvoir doit se rendre à l’évidence : il a échoué à répondre à l’aspiration de notre Peuple à la liberté, à l’indépendance véritable, à la paix, à la justice et à la prospérité.
Il ne lui reste qu’à en tirer les conséquences.
Dans l’intérêt même du pays, j’appelle nos autorités à tirer ces conséquences plutôt que de se perdre dans des manœuvres dilatoires préjudiciables à la cohésion nationale.
Ces manœuvres, je les connais bien pour en être devenu malheureusement la cible privilégiée. Je veux parler des campagnes de haine et de la chasse à l’homme qui sont menées contre moi, et qui font perdre de vue à nos autorités leurs missions essentielles : résoudre la crise qui secoue encore notre pays, voler au secours des compatriotes qui sont dans la détresse, remettre notre pays sur les rails du progrès économique, et j’en passe.
Par exemple, on monte de toutes pièces contre moi une accusation d’atteinte à la sûreté de l’Etat, de crime et de complicité de crime dont on peine à trouver les preuves. Et comme le dossier est vide, on multiplie les campagnes de diffamation et de haine, en envoyant au front un certain Kossimachi, en y consacrant des émissions entières sur les ondes de la radio nationale, en finançant des "livres" pour faire le sale boulot sur les réseaux sociaux et, plus récemment, en payant de pauvres enfants pour qu’ils manifestent contre moi, qui plus est en usurpant le nom et la douleur des victimes. Plus grave encore, on envoie des étrangers qui n’ont aucune légitimité pour agir interroger les 6 personnes détenues dans cette affaire depuis 2017 sans jugement !, ou plus exactement pour essayer de leur extorquer des aveux qui me chargeraient, en contrepartie de leur libération. Et, toujours parce que le dossier est vide, on s’est dépêché de classer sans suite la plainte que j’avais moi-même déposé contre ledit Kossimachi en 2017, et à travers laquelle je voulais qu’on fasse pleinement la lumière sur ces accusations.
Que dire des opérations d’intimidation ? On s’y est livré pendant que j’étais à l’étranger en espérant que cela me dissuaderait de rentrer au pays. On s’y livre encore ici et maintenant pour m’empêcher de circuler, de me rendre à l’Assemblée nationale, bref d’exercer mon mandat de député. Tout cela parce qu’on cherche le prétexte pour me déchoir de cette qualité de Député, ajoutant ainsi une nouvelle infamie à celle de ma destitution, obtenue en violation de la Constitution et sur la base de motifs mensongers, comme le démontre le récent Rapport de la Cour des comptes.
Tant d’énergie - et d’argent puisque chacune de ces opérations est grassement financée sur fonds public - tant d’énergie, disais-je, dépensé pour quel bénéfice pour le pays ? Aucun ! Néant ! Pire encore, avec les stigmatisations d’étranger et de musulman qui accompagnent ces campagnes, on ne fait que semer davantage la discorde entre les centrafricains, qu’exacerber les haines et les rancœurs.
Mais qu’on se le dise. Les inspirateurs et les agents de cette campagne ne triompheront pas. La preuve, je suis ici devant vous, et je suis déterminé. Déterminé à exercer pleinement mon mandat de Représentant de la Nation ; déterminé à accomplir tout aussi pleinement ma mission de défense des intérêts du peuple, déterminé enfin à me battre pour le respect du droit dans notre pays.
En conclusion je suis et je resterai debout. Parce que notre pays mérite mieux. Il mérite la liberté, l’indépendance véritable, la paix, la justice et la prospérité.
Il mérite aussi le respect.
Bangui, le 13 novembre 2019
Le 13 novembre 2019